Une histoire de famille…

Très vite beaucoup de choses changent, surtout dans la manière de concevoir l’organisation générale, car tous ces jeunes sont imprégnés des techniques modernes de communication. Et même s’ils ne tournent pas entièrement le dos aux pratiques de la battue classique à cor et à cri, la mise en œuvre de la traque-affût impose des conceptions véritablement nouvelles. La journée de chasse que je partage avec ces jeunes chasseurs, en ce samedi de décembre 2023, a été préparée avec minutie, à l’avance. L’ensemble des participants est intégré dans un groupe « Whatsapp », rendant tous les messages interactifs. Ce groupe comprend 24 chasseurs à tir, 7 chasseurs à l’arc, et une quinzaine de rabatteurs répartis en 4 groupes. Ils ont ainsi, dans leur smartphone, toutes les composantes de l’organisation de la journée, des différentes règles à observer, jusqu’à la réservation anticipée de venaison, en passant par le « chapeau » (contribution versée aux rabatteurs), dont le montant est payé par voie électronique, via une plateforme en ligne. La chute brutale des températures (il gèle ce matin-là à –5°), a conduit, la veille de la chasse, les organisateurs à changer le lieu de rendez-vous habituel, afin de limiter les bruits et autres dérangements de la première enceinte, dont la surface est estimée à environ 350 ha. Sur un simple message, l’ensemble des acteurs de la journée se sont donc retrouvés au grand parking de la Chaussée de Mons, à la sortie de Chimay…

 

Rond du matin et consignes

Les postes, tous sur miradors, ont auparavant été sélectionnés, et déclinés sur une carte que les participants ont reçue, via Whatsapp. Cette carte est aussi doublée d’un tirage papier, distribué à l’occasion, lors du tirage au sort des numéros de poste qui se fait lors du rond du matin. Rien n’y manque : emplacement des postes, archers et carabines, places de parking, manœuvres des groupes de traqueurs, règles de sécurité et de tir, signification des jalons, tableau des observations, procédures de contrôle des tirs, rapatriement des carcasses. Pour ma part, placé en observation sur le mirador 60, je n’aurai aucune difficulté à trouver ma place, le fléchage sur le terrain étant des plus clairs. Après le café/viennoiseries du matin, Matthieu assure la présentation de la journée, et affiche clairement l’objectif : « tendre vers une balle/une pièce ! Donc pas de tir à la course sur chevreuil, et au plus sur un sanglier au petit trot… ». Puis il laisse la parole à Nicolas qui énonce, à partir d’une tablette, les consignes de tir et de sécurité, ainsi que les procédures à observer pour faciliter le ramassage des animaux tués, les contrôle des tirs, la fin de traque étant fixée à la montre, à 11h45. L’accès à chaque poste étant autonome, tous les participants se dispersent très rapidement vers l’endroit de leur parking voiture, et gagnent ensuite leur emplacement respectif.

 

La traque, silencieuse, met sur pied beaucoup d’animaux…

A peine suis-je arrivé à mon mirador, que des coups de carabine brisent le silence de la forêt. La traque est silencieuse, et seuls quelques coups de bâton contre les troncs d’arbres résonnent. On entend quelques échanges intermittents entre le chef de groupe et ses rabatteurs via la radio, mais en revanche, le réseau Whatsapp s’anime, permettant ainsi de vivre la chasse d’une manière que je ne connaissais pas encore. « au 10, 4 chevreuils au grand galop… Tir sur chevreuil au 5… Brocard décoiffé au 20… Dix sangliers passés entre le 52 et le 54… Gros sanglier vers le 58…. Petit brocard tué au 20… ». Personnellement, je vois passer à une cinquantaine de mètre, une chevrette et ensuite, au pas, son chevrillard… que je ne parviens pas à arrêter. Certes, il faut jongler entre son écran de smartphone et l’environnement de son poste, mais toute cette animation, extrêmement sympathique au demeurant, vous plonge dans une ambiance animée et participative. Durant ces deux heures d’affût, j’ai quasiment tout vu passer… sauf le temps. A 11h 45, comme prévu, la battue qui fut particulièrement animée, est terminée. Chacun regagne sa voiture pour se rendre au rendez-vous, lequel n’est autre que l’ancienne gare de Virelles, la chasse étant traversée par l’ancienne ligne de chemin de fer conduisant à Chimay, transformée depuis en piste bétonnée. A l’extérieur de la bâtisse, deux braseros rassemblent les chasseurs autour de la flamme. On refait l’enceinte en partageant l’apéritif, réel moment de convivialité. Puis arrivent les premiers animaux prélevés et récupérés à l’aide d’un quad qui tracte une remorque, direction l’atelier de découpe. Ici, pas de temps de perdu, et chacun se consacre à la tâche qu’il s’est donnée… Pesée, marquage et traitement des carcasses sous la responsabilité du garde Fabian Lamblot. Cette équipe de jeunes est vraiment admirable !

 

Un tableau très honorable

Une bête de compagnie et 9 chevreuils figurent au tableau de la matinée, et deux tirs sont à contrôler. Dans le pavillon, une petite chaine se forme, pour accéder aux sandwiches et à un bol d’une délicieuse soupe chaude,  préparée et servie par Astrid. Tout le monde se met à table, pour une pause conviviale, mais sans prolongation excessive, car la journée se poursuit par une seconde traque. Dès le début d’après-midi, Matthieu rassemble les participants pour faire le bilan de la première battue, et enclencher l’organisation de la seconde, dont la fin est fixée à 16h15. Alors que les chasseurs et traqueurs quittent le rendez-vous pour se mettre en place, j’accompagne Charles-Adrien de Bonhome et sa chienne Siska, sa fidèle Rouge de Bavière pour un premier contrôle de tir sur sanglier. Il sera négatif. Mais le second contrôle, sur un chevreuil tiré le matin, sans indice à l’emplacement du tir, sans réaction apparente de l’animal, est retrouvé mort à une centaine de mètres, touché d’une balle de thorax. L’ensemble des participants est immédiatement informé, et les compliments qui arrivent en retour ne se font pas attendre. « Bravo Charly ! Comme quoi, il faut toujours faire un contrôle… ». Puis le conducteur me dépose au mirador 20, et repart, sollicité pour de nouveaux contrôles…

 

Un après-midi animé

La traque reste très active car des sangliers sont signalés un peu partout, de même que des chevreuils. Plusieurs tirs se font entendre et arrivent bientôt sur les portables quelques photos prises sur le vif ainsi que deux courtes vidéos qui témoignent de l’activité en sous-bois, et bien sûr, des messages de tirs réussis sur chevreuil et sur sanglier. Devant ces résultats, et bien avant la fin de battue prévue, Matthieu demande l’arrêt du tir sur chevreuil, puis une heure après, annonce la fin anticipée de la chasse. Très vite, les animaux morts arrivent au rendez-vous où, comme en fin de matinée, plusieurs petites équipes se forment et s’affairent, pour disposer les animaux sur la pelouse, allumer les feux en vue du tableau et préparer le barbecue du soir. Sur sa tablette, Nicolas enregistre toutes les données du tableau de chasse : espèces, poids vidés, venaison réservée, venaison à préparer, nom des tireurs. Au tableau de la journée, on compte 16 chevreuils et 5 sangliers pour 27 balles tirées, un ratio que Matthieu annonce fièrement en préambule à la présentation du tableau de chasse, et à la remise des brisées, commentée avec humour et dans la bonne humeur. Que des belles balles, sans aucun gâchis de venaison, des chasseurs qui ont scrupuleusement respecté les règles en vigueur, une organisation sans faute saluée par une belle journée de soleil hivernal… Des jeunes chasseurs vraiment investis dans toutes les tâches que nécessitent l’exercice de la chasse collective… La chasse de Virelles est bien un modèle du genre en matière de traque-affût… Un modèle aussi, qui m’a laissé à la fois admiratif et enthousiaste…

 

Au pays de la « Bière de Chimay »

Produite à l’Abbaye de Scourmont, la Bière de Chimay est l’une des 6 sortes de bière trappiste produite en Belgique. Sous le contrôle des moines, une partie des revenus engendrés par sa commercialisation est destinée à des œuvres caritatives. Elle bénéficie ainsi du label « Authentic Trappist Product », symbolisé par un logo hexagonal. La Bière de Chimay est déclinée en six versions, la moins forte étant la « Chimay Dorée » titrant 4,8°, et la plus forte dénommée « Chimay Verte » titrant 10°. Dans un des bars de la ville, je me suis laissé dire qu’on y servait « L’œil du Tigre », un délicieux, mais sulfureux cocktail fait de « Chimay Bleue » et de Picon. C’est bon à savoir, et encore meilleur à déguster... mais bien évidemment, toujours avec modération !

 

Et pour le plaisir, les deux courtes vidéos de la journée :

 

Malgré une traque très soft, une compagnie de sangliers fuit à toute allure… 

 

 

Vidéo de Luc Vander Elst : Chevreuil en mouvement… Un coup de sifflet énergique et… il s’arrête !