Ce blocage met en lumière la complexité de l’équation climatique européenne, où ambition et réalisme économique s’entrechoquent. Certains États membres, notamment du nord et de l’ouest, soutiennent l’objectif de 90 % et insistent sur la nécessité de clarté pour orienter les investissements vers les énergies renouvelables, les technologies propres et l’efficacité énergétique. Pour ces pays, la fixation rapide d’un objectif intermédiaire renforcerait la sécurité juridique et stimulerait la confiance des marchés. À l’inverse, plusieurs économies plus fragiles d’Europe centrale et orientale craignent que la transition ne se traduise par une désindustrialisation brutale, une perte de compétitivité et une explosion des coûts sociaux. Ces inquiétudes alimentent des appels à davantage de flexibilité, voire à un objectif moins strict. Le compromis recherché pourrait reposer sur une combinaison d’exigences fortes pour l’ensemble de l’UE et de mécanismes de solidarité renforcés pour les pays les plus vulnérables. Au-delà de la mécanique interne, l’enjeu est aussi diplomatique : l’UE a bâti sa réputation internationale sur son rôle moteur dans la lutte contre le changement climatique. Tout recul ou retard entamerait sa capacité à entraîner d’autres grandes puissances émettrices. L’incertitude actuelle pourrait également peser sur la préparation des stratégies nationales à long terme et sur l’alignement des politiques énergétiques et industrielles avec les trajectoires climatiques. En définitive, le sommet d’octobre sera décisif : il devra non seulement trancher sur le chiffre de 90 % ou une autre valeur, mais aussi clarifier les modalités de mise en œuvre et les garanties de justice sociale. Le résultat conditionnera à la fois la crédibilité de la trajectoire européenne vers 2050 et la capacité du continent à conjuguer transition verte, compétitivité économique et cohésion politique.