Nous avons retrouvé, dans nos archives, cette perle qui en son temps avait fait sourire, et même souvent plus, tout le chablisien, terre de chasse de l’ami et regretté Michel Vocoret. En souvenir de quelques journées de chasse qui ont sans doute inspiré son récit…
« La bâche de la deudeuche ? Un grillage, tellement qu'elle était cuite. Faut dire qu'elle a jamais vu le garage, pour la simple et bonne raison qu’y fallait ouvrir les portes, et le Pierre l'était tellement trainiaux que, pour pas qu'il mange la soupe du soir seul, il eut fallu qu’y la mange dans l'lit. Enfin la deudeuche, en un mot, c'était la voiture de chasse, celle qui fait rentrer les gens plus tard que les autres. Pas de siège à l'arrière ! Y a jamais de siège dans les niches à chiens. Au jour d'aujourd'hui, vous voyez un véhicule de c’genre-là dans une chasse de première catégorie ? Quelle honte ! Mais c'qui y'avait derrière par contre… Carillon et Tambour, deux chiens de pays p't'ête, mais avec eux, on avait la garantie d'une belle journée de chasse à l'ancienne, vous savez, celle où l'on chasse un sanguier qu'on loupe, et qui alimente les causeries de toute la semaine. Avant, on tuait un sanguier, on buvait trois coups. Maintenant on ne tue que trois sanguiers, on boit rin du tout, sauf les piqueux et leurs amis ! Mais ça, c'est une race à part. Tiens, le Pierre et le Gégène y disaient : « nous quand on est assis dans la deudeuche, on a l'cul sur l'armoire à fusils ». C'est vrai qu'c'était ben pratique, les housses tête bêche sous les sièges, jamais fermées les housses. Tiens, un coup, Gégène pour ça aille plus vite pour dégainer, il avait pas déchargé l'fusil, c'qui fait que, quand il l'a retiré de la housse, y'a l'coup qu'est parti dans la portière du Pierre, qu'avait drôlement ben fait de prendre son temps pour stationner la deudeuche. Ça fait cinq ans de ça, et le trou, l’est toujours pas bouché. C'est pas de la négligence qui disait le Pierre, c'est pour faire causer les gens, et ça marche. Chaque région a sa race de chasseurs. Tiens, l’Denis, un Morvandiau, eh ben la cabine de son tracteur, c'est l'armoire à fusils. Un jour, y passe devant chez son copain Lulu, l'fusil à la bretelle.
- Alors Denis, tu t'en vas faire un p'tit tour à la chasse ?
- Ben non, j'va labourer…
- T'aurait pas oublié queque chose par hasard ?
- A merde, le tracteur ! ».