Le décret du 4 août 1789, abolissant les droits féodaux, stipula la fin du « droit exclusif de chasse » et des « garennes ouvertes », rendant la chasse désormais soumise au droit de propriété. Le décret sur la chasse du 30 avril 1790 vint encadrer cette liberté nouvelle : désormais, nul ne pouvait chasser sans le consentement du propriétaire des terres. Toutefois, les fermiers étaient autorisés à détruire le gibier dans leurs propres cultures, notamment en période de récolte. Ces textes marquèrent une avancée démocratique majeure, mettant fin à un monopole tout en posant les premières bases d’une régulation de la faune, déjà perçue comme indispensable. Mais l’idéal révolutionnaire ne s’arrêta pas là. En octobre 1789, lors de la célèbre marche sur Versailles, le peuple demanda non seulement l’application des décisions de l’Assemblée nationale, mais aussi la libération des animaux enfermés dans les ménageries royales. Hormis les bêtes jugées dangereuses, les autres furent transférées à Paris dans des enclos plus vastes. C’est ainsi que naquit le premier jardin zoologique public, au Jardin des Plantes, en 1793, affirmant une volonté nouvelle : celle de respecter aussi le monde animal, tout en le rendant accessible à l’ensemble des citoyens. La Révolution sema ainsi les graines d’une nouvelle perception de la chasse, qui ne devait plus être le privilège d’une minorité, mais s’inscrire dans une logique collective, économique et écologique. Loin de disparaître, la chasse allait se transformer. De loisir noble, elle allait devenir un outil essentiel de gestion du territoire et des écosystèmes.

 

Deux siècles plus tard...

Aujourd’hui, dans un contexte de transformation rapide des milieux naturels, la chasse moderne joue un rôle crucial. En effet, la fragmentation des habitats et la réduction de la biodiversité rendent nécessaire une régulation humaine. C’est notamment le cas des sangliers, chevreuils et cerfs, dont les populations peuvent rapidement croître, provoquant des dégâts considérables aux cultures agricoles et aux forêts. Les chasseurs du 21ème siècle ne sont plus les figures hédonistes de la cour de Versailles. Ils sont encadrés par des réglementations strictes, formés, soumis à des plans de gestion validés par les autorités, et agissent souvent en partenariat avec les scientifiques et les agriculteurs. Ils participent à des missions de comptage, d’entretien des milieux, et interviennent dans la prévention des zoonoses. Leur rôle, loin d’être purement récréatif, est profondément ancré dans une logique de régulation écologique et de prévention des déséquilibres. Il est essentiel de comprendre que la chasse moderne, loin de contredire l’esprit de la Révolution, en prolonge l’élan : elle vise le bien commun. Elle s’inscrit dans une politique d’équilibre entre la protection de la nature et l’activité humaine. La gestion raisonnée des espèces est indispensable pour éviter des situations de surpopulation, d’appauvrissement des écosystèmes, ou de conflits avec les activités humaines. Enfin, dans un monde où la biodiversité est menacée, où certaines espèces disparaissent tandis que d'autres prolifèrent sans contrôle, la chasse peut être un outil de préservation s’il est exercé avec responsabilité, science, et respect. Il ne s’agit plus de tirer pour le prestige, mais de prélever de manière équilibrée pour protéger un environnement global, mais fragilisé. Dans un monde en mutation, la chasse responsable reste, plus que jamais, indispensable.