En premier lieu, reprenons la notion d'énergie cinétique qui, selon Wilhelm von Leibniz et Johann Bernoulli, serait comme une force vivante responsable du mouvement des corps. Poursuivons avec celle de quantité de mouvement, décrite par Descartes et Newton, entité rationnelle censée jouer le même rôle, mais pas toujours utilisée à bon escient.

 

L’énergie cinétique

D'abord, petits rappels théoriques de ce qu'est l'énergie cinétique et des valeurs publiées sur les tables balistiques, ainsi que leurs importances quant au choix du calibre et de la masse d'un projectile. Ainsi, tous les phénomènes physiques qui produisent du travail mettent en jeu de l'énergie. On sait qu'énergie et travail sont des grandeurs de même nature et s'expriment avec la même unité, c'est-à-dire le joule (J) dans le système international des unités. En réalité, il existe plusieurs formes d'énergie suivant la nature du phénomène qui produit le travail. Plus particulièrement, on distingue l'énergie de mouvement ou énergie cinétique due au travail de la résistance de l'air, et l'énergie potentielle due au travail de la pesanteur… Or, à cause du peu d’étendue en hauteur de la plupart des trajectoires, cette dernière forme d'énergie pourra être ignorée. Il reste donc l'énergie cinétique de marche en avant d'un projectile (ou énergie de mouvement de translation) qui est une fonction de sa masse m et de sa vitesse V, selon la formule bien connue des lycéens : Ec = 1/2mV2. Elle est aussi égale au travail fourni quand elle disparaît, c'est-à-dire quand le projectile percute un obstacle. Le mouvement du projectile comporte de même un mouvement de rotation lorsqu'il est tiré à partir d'un canon rayé. Il apporte alors une énergie cinétique supplémentaire. Cependant, la contribution de l'énergie cinétique de ce mouvement est presque toujours négligée, compte tenu de sa petitesse.

 

Exemple emprunté à la chasse 

Soit une balle de 15 g (232 gr) avec une vitesse à l'impact de 701 m/s. On calcule une énergie cinétique résiduelle égale à : Ec = ½ x 0,015 x 7012 = 3686 J si la masse s'exprime en kg et la vitesse en m/s. L'ANCGG préconise une énergie minimale de 1000 J à 100 m pour toutes espèces de gibier ongulé, et jusqu'à 2500 J pour le cerf et le sanglier adulte. L'énergie cinétique de translation est une donnée importante quant au choix de la munition en fonction du gibier chassé. En effet, c'est le transfert de cette énergie entre la balle et l'organisme de l'animal qui produit le travail de destruction au moment de l'impact, l’important pour le chasseur étant de choisir la munition qui « tue le mieux », c’est-à-dire sans souffrances inutiles.

 

Quantité de mouvement

Physiquement, le produit Q=mV mérite le nom de quantité de mouvement. Son unité légale est le kg.m/s (ou le N.s). Reprenons notre exemple précédent : Q = 0,015x701 = 10,5 kg.m/s. En fait, pour le chasseur, cette valeur n'est pas très représentative de la force d'impact. Se rappeler que : 1 N = 1 kg.m/s2 est la force nécessaire pour accélérer (ou décélérer) une masse de 1 kg d'un m/s par unité de temps.

 

Question importante

Pratiquement, l'évaluation de la quantité de mouvement peut-elle servir d'élément d'appréciation du taux de létalité d'un tir ? Non, car son influence apparaît comme négligeable sur le grand gibier. De même, l’effet physiologique qui lui est parfois attribué peut être difficilement mis en évidence. D'après certains auteurs, cet effet, d’origine nerveuse, peut aller jusqu’à la mort, car le choc par impulsion est transmis à l’animal dans le temps extrêmement court que met la balle pour s’arrêter (quelques millièmes de seconde seulement). Par conséquent, certaines parties du corps sont susceptibles de subir une forte accélération équivalente à plusieurs fois la pesanteur (effet de déchirement ou d’arrachement). Il reste donc la véritable puissance destructrice imputable au seul transfert d'énergie entre les projectiles en mouvement et les organes touchés. Dans ces conditions, il est clair que l’on n’a aucun intérêt à vouloir s'intéresser à la quantité de mouvement, car ce sont les projectiles à haute vitesse énergétique qui ont finalement le pouvoir vulnérant le plus important. Comme en plus la vitesse de la balle décroît avec la distance, du fait du freinage atmosphérique, on comprend volontiers pourquoi il est nécessaire de choisir des munitions dont la force vive reste intacte le plus longtemps possible. D’ailleurs, comme il a été rappelé précédemment, sa formule tient compte à la fois de la masse et de la vitesse élevée au carré. Les deux éléments essentiels de l’efficacité y sont donc inclus, et son calcul est facile et rapide. C’est pourquoi, les fabricants de munitions considèrent unanimement que l’énergie cinétique reste un critère de sélection suffisant, et la font figurer sur leurs tables de tir à l’usage des chasseurs

 

Notre avis

La quantité de mouvement des projectiles n’est pas une donnée balistique directement exploitable, et une valeur élevée ne constitue pas une preuve d’efficacité destructive. Il en résulte que, pour les chasseurs les moins avertis en matière de balistique lésionnelle, l’introduction de la notion même de quantité de mouvement, bien qu'elle soit couramment mise en avant dans certaines revues consacrées à la chasse, ne peut donc que compliquer inutilement les critères de choix des munitions, d’ailleurs déjà suffisamment nombreux.