Les premiers signes du rut du sanglier sont visibles... Les compagnies se reforment, et les prétendants gravitent autour des laies, formant une constellation de mâles « satellites », prêts à intervenir dès que les femelles seront réceptives. Les jeunes, encore inexpérimentés, attendent prudemment qu’un vieux quartanier distrait leur laisse une chance. Chez les mâles dominants, les affrontements sont fréquents, spectaculaires et souvent violents : coups de boutoirs, grondements sourds et poursuites témoignent de la vigueur et de la hiérarchie du groupe. Durant cette période, l’organisme du sanglier mâle est en ébullition hormonale. Ses testicules, logés dans un scrotum externe, assurent la production des spermatozoïdes et de la testostérone, hormone clé du comportement reproducteur et du développement musculaire. Fait rare chez les mammifères, le sanglier sécrète également une petite quantité de DHEA, une hormone stéroïde que l’on retrouve habituellement chez l’homme et les grands singes : un mystère biologique encore inexpliqué. La fécondation, interne comme chez tous les mammifères, conduit à un développement embryonnaire vivipare : les fœtus se nourrissent directement grâce à la vascularisation utérine de la laie. Les performances reproductrices du mâle sont remarquables : il peut émettre jusqu’à 250 ml de sperme par saillie, soit près de cent fois plus qu’un homme.
De tels exploits ont nourri, au fil des siècles, un folklore rural foisonnant : testicules séchés, bile ou urine de sanglier étaient jadis vantés pour leurs prétendues vertus aphrodisiaques, reflet d’une fascination ancestrale pour la force de l’animal. Au-delà du mythe, la science a mis en lumière une réalité tout aussi fascinante : la paternité multiple. Des recherches génétiques menées par l’ONCFS en forêt d’Arc-en-Barrois ont révélé que plus de 60 % des portées de laies proviennent de plusieurs mâles. Chaque femelle s’accouple, en moyenne, avec deux à trois partenaires durant le rut, favorisant ainsi une descendance génétiquement diversifiée. Cette polyandrie améliorerait la survie et la robustesse des marcassins, même si le poids et la taille des fœtus n’en dépendent pas directement. La fécondité des laies varie enfin selon les conditions écologiques : les années de forte glandée, riches en fruits nutritifs, stimulent leur reproduction. Les chercheurs ont compté jusqu’à 8 corps jaunes par laie lors des bonnes saisons, contre 4 les années pauvres. Ces glands, riches en lysine, améliorent aussi la lactation, garantissant aux marcassins une croissance rapide et vigoureuse. Symbole de puissance et de vitalité, le sanglier incarne à la fois la force brute et la complexité du monde sauvage. Entre comportements instinctifs, stratégies adaptatives et mythes humains, le rut demeure un spectacle saisissant d’équilibre entre nature et culture.
alabillebaude
La chasse... demain !